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Environnement et développement équitable

Moderniser l'économie

Laure Waridel, sociologue et auteure

Si je vous demandais quelles sont vos plus grandes richesses, que me répondriez-vous? Me parleriez-vous d'abord de votre compte en banque ou de votre santé? De vos REER ou de votre savoir? De vos assurances ou de votre famille et de vos amis? Me parleriez-vous de l'air, de l'eau et de la nourriture qui vous maintiennent en vie?

Bien que toutes ces formes de richesses ne s'opposent pas les unes aux autres, force est de constater que notre système économique accorde peu de considération à ce qui ne se calcule pas en argent. Les coûts ­environnementaux et sociaux n'apparaissent d'ailleurs pas dans les rapports annuels des grandes entreprises et ne sont pas soustraits du PIB, le principal indicateur de prospérité d'une nation. Ces externalités ont pourtant une incidence bien réelle sur la vie de tous les habitants de la planète et sur les écosystèmes qui assurent notre survie depuis des millénaires. Ces «coûts cachés» hypothèquent non seulement l'éco­nomie (on a déjà pu le constater au Québec dans les secteurs des pêches et de la forêt notamment), mais l'avenir même de l'humanité. Des scientifiques de toutes les disciplines le disent et le redisent dans toutes les langues, mais leur voix est étouffée par la cacophonie de systèmes ­financiers gavés à la croissance.

Et pourtant, seriez-vous en mesure de deviner qui est ­l'auteur de cette citation?

«L'activité humaine met une pression si forte sur les fonctions naturelles de la Terre que nous ne pouvons plus tenir pour acquis la capacité des écosystèmes de la planète à soutenir les générations futures. (…) Les ­activités humaines ont mené la planète vers un point limite au-delà duquel on peut s'attendre à une vague massive d'extinction des espèces, renforçant encore la menace sur notre propre bien-être. (…) La pression sur les écosystèmes va augmenter de manière globale dans les décennies à venir si les attitudes et les actions ­humaines ne changent pas.»

Non, il ne s'agit pas de propos tenus par le représentant d'une organisation environnementale. Cet extrait est signé par Robert Watson, conseiller scientifique en chef de la Banque Mondiale, une institution clairement néolibérale. Il présidait alors l'Évaluation des écosystèmes pour le millénaire, menée par 1360 experts de partout dans le monde qui ont fait le point sur l'état de santé de la planète.